Le papa du World Wide Web ne donne pas cher de la peau des grandes entreprises numériques à long terme. Pour lui, un changement est nécessaire pour éviter que les inégalités numériques ne se creusent davantage.
Ce n'est pas la première fois que le principal fondateur du WWW, le World Wide Web (et non pas le Wild Wild West !) né en 1989, sort du bois pour faire part de son inquiétude sur la toute-puissance des géants du numérique, ou pour appeler à une plus grande régulation de leurs activités. Tim Berners-Lee a récidivé, cette semaine, dans un entretien accordé à l'agence Reuters.
Berners-Lee ressent un « sentiment d'agitation »
Alors que le Web se détourne peu à peu de l'esprit prôné par ses créateurs, qui militaient pour la création d'un espace de liberté et d'ouverture, Tim Berners-Lee, l'un de ses plus éminents pionniers, estime que la domination des géants du numérique est une « mode » qui n'est pas faite pour durer.
L'informaticien britannique estime qu'il est urgent d'agir pour réduire la fracture numérique chez les jeunes et améliorer l'accès en ligne des personnes qui souffrent de difficultés aujourd'hui à se connecter au monde.
Ces temps-ci, Tim Berners-Lee ressent un « sentiment d'agitation, un sentiment que nous devons faire basculer les choses pour changer ». Les derniers événements en Australie, où Facebook a un temps bloqué les contenus d'actualité australiens de sa plateforme pour protester contre un projet loi visant à exiger du réseau social qu'il rémunère les médias locaux en l'échange d'une publication de leurs contenus, ont sûrement renforcé le point de vue de Berners-Lee.
Le vent du changement souffle-t-il sur les géants du numérique ?
En ce qui concerne un changement de relation futur entre les géants du numérique, les internautes et les gouvernements, Berners-Lee se dit « optimiste, car nous avons déjà vu des modes dominantes sur Internet… et puis les choses changent » avant d'ajouter qu'il y a « une grande conscience que les choses doivent changer ». Dans plusieurs pays occidentaux, les géants du numérique font l'objet d'enquêtes et de sanctions qui pourraient, à force d'intensification, mettre à mal leur domination du secteur à l'avenir.
Mais, pour lui, la volonté de la population de s'opposer à la ponction et au traitement abusifs de leurs données personnelles doit sonner comme une opportunité dont les gouvernements du monde entier doivent se saisir, comme il peut le faire avec sa plateforme Solid, via laquelle les données personnelles sont directement contrôlées par les utilisateurs, propriétaires de ces informations.
Tim Berners-Lee complète aussi son argumentaire en mettant en garde le monde contre la fracture numérique croissante qui toucherait plus d'une personne sur trois âgées de 15 à 24 ans. Le combat pour un numérique sain pour tous n'est donc pas encore gagné.
Source : Reuters